SOCIETE / SERVICE PUBLIC
CAP22, nouvel outil de destruction du modèle social
Attendu, ou plutôt redouté, le rapport du Comité action publique 2022 ne sera finalement pas rendu public en juillet, mais distillé au fur et à mesure des réformes qu’il préconise, a annoncé le Premier ministre le 2 juillet.
Des réformes qui, au motif de réduire la dépense publique, risquent de détruire des missions publiques, le cadre statutaire des agents et d’accélérer le désengagement de l’État.
FO condamne cette atteinte à la République et à toute la Nation.
Le comité compte 34 membres nommés par le gouvernement dans le cadre du Programme Action publique 2022 lancé le 13 octobre 2017. Ce programme comprend ce comité, un forum de l’action publique et des chantiers interministériels censés servir de « boîte à outils » pour créer des lignes de réformes.
Le programme vise à une transformation du service public et du modèle de l’action publique. L’exécutif a confié à CAP22 la charge de passer en revue les missions de l’État, de ses opérateurs ainsi que les missions propres à la Sécurité sociale et aux collectivités territoriales.
CAP22 est dirigé par l’actuel président franco-australien du conseil d’administration de Safran.
À ce comité participent aussi des hauts fonctionnaires, des représentants du secteur privé et même des personnalités étrangères. La représentation du monde syndical se limite à la présence d’une ancienne secrétaire nationale de la CFDT.
CAP22 doit proposer un panier de recommandations dans lequel le gouvernement puisera des mesures à mettre en œuvre. Autant dire que les mesures qui sortiront du panier inquiètent. FO notamment.
Des réformes pour donner des gages aux marchés financiers.
La lettre de mission du Premier ministre à CAP22 ne faisait pas mystère des intentions.
Le comité, qui aura à proposer des réformes structurelles, devra mesurer l’opportunité du maintien et le niveau de portage le plus pertinent de chaque politique publique. Cela pourra notamment le conduire à proposer des transferts entre les différents niveaux de collectivités publiques, des transferts au secteur privé, voire des abandons de missions.
L’un des objectifs prioritaires du programme consiste en effet à accompagner rapidement la baisse des dépenses publiques. Une baisse de 3 points de PIB d’ici à 2022, conformément à la trajectoire promise par la France à Bruxelles.
Le Programme 2022, qui doit participer à accélérer le recul de la dépense publique ̶ une trentaine de milliards a priori ̶ envisage une possible réduction de voilure de la sphère publique.
Pour FO, qui ne cesse de demander que soit effectué un bilan des multiples réformes engagées depuis plus de dix ans, ces objectifs sont inadmissibles.
Lors du 24e congrès confédéral FO en avril dernier, les délégués ont fustigé les attaques contre le service public, ses missions et ses personnels dans la résolution générale.
En réduisant les moyens publics, en multipliant les suppressions de postes, en détruisant les services publics et en transférant les missions publiques au secteur privé, les gouvernements de ces dernières décennies ne cessent de se conformer à l’idéologie libérale et dérégulatrice, afin de donner des gages aux marchés financiers, s’indigne l’organisation FO qui demande que le champ des services publics soit maintenu dans ses missions actuelles et étendu en prenant en considération les nouveaux besoins émergents tels que la dépendance ou le numérique.
Pour FO, entre autres projets de réformes, le Programme Action publique 2022 constitue une attaque majeure contre le service public et ses agents, tout autant que contre les citoyens eux-mêmes.
Avant CAP22, des réformes ont installé le principe du repli des services publics
La philosophie de la réduction de voilure de l’État et de la puissance publique sert de moteur aux multiples réformes lancées depuis une dizaine d’années.
Avec la RGPP (Révision générale des politiques publiques) à partir de 2007, l’État, vantant la recherche de gains de productivité, a désorganisé les services publics et le travail des agents à coups de fusions et de restructurations, avec une perte massive d’effectifs.
La réforme de l’administration territoriale de l’État (RéATE), lancée en 2010, a fait elle aussi des ravages sur le plan des effectifs et de la présence de l’État sur le territoire.
Cette réforme a regroupé différentes directions ministérielles au sein de directions interministérielles régionales ou départementales et a placé ces structures fourre-tout sous l’autorité des préfets. La présence et les composantes en termes de services de ces entités sont modulables selon les territoires.
Elles ont été des laboratoires de casse des missions n’a cessé d’alerter FO.
« Le service public est un bien commun »
En 2014, La loi MAPTAM (modernisation de l’action publique territoriale et affirmation des métropoles) a, elle, installé la Région comme chef de file des territoires et lui a accordé de nouvelles compétences, notamment économiques.
Cette loi a institué aussi, entre autres, la création de structures intercommunales géantes, entraînant la fusion de services locaux. En 2015, la réforme territoriale est venue tracer une nouvelle carte administrative via le passage (au 1er janvier 2016) de 22 à 13 régions par le regroupement de plusieurs d’entre elles.
La loi (du 7 août 2015) portant la nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe) a complété l’axe choisi. Cette réforme a organisé l’éloignement de l’usager des services publics, invités d’ailleurs à se restructurer encore et à fusionner, donc à abandonner leurs implantations locales.
Dans sa résolution générale, le congrès confédéral FO d’avril 2018 a rappelé que sous couvert de proximité, ces réformes visent au contraire à désengager l’État et conduisent à accroître les inégalités sociales et territoriales, et à créer une véritable balkanisation de la République au profit de baronnies.
Il a condamné cette tendance, notamment la loi NOTRe, se prononçant au contraire pour un État stratège, pilote et acteur, mais aussi garant des principes constitutionnels, que ce soit par le biais de ses services publics ou de ses politiques publiques.
Pour FO en effet, le service public n’est pas l’expression d’un coût, il est avant tout un bien commun […] Ainsi, disloquer les services publics c’est attaquer la République, c’est prendre le risque d’affaiblir la Nation.
Sourcing: VALÉRIE FORGERONT, in FO Hebdo
FO La force de l’information
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