Depuis la Loi du 8 août 2016 dite Loi Travail (1), la législation en matière d'heures supplémentaires, et notamment leurs majorations, a été bouleversée.
Pour comprendre comment les heures supplémentaires sont décomptées, il faut savoir qu'une heure supplémentaire est une heure accomplie au-delà de la durée légale, fixée à 35 heures par semaine (2).
Ces heures effectuées en plus sont majorées (et ou donnent droit à contrepartie en repos), c'est-à-dire qu'elles sont rémunérées de façon plus favorable. Pour ce faire, un pourcentage de majoration est appliqué au taux horaire de rémunération.
10%.
C'est le taux minimum de majoration des heures supplémentaires
Le Code du travail prévoit qu'une convention ou accord d'entreprise ou d'établissement, ou bien à défaut une convention ou un accord de branche détermine le taux de majoration des heures supplémentaires. Ce taux ne peut être inférieur à 10% (3).
Ce n'est qu'à défaut d'accord collectif que la règle du Code du travail s'applique.
La loi est supplétive.
Elle prévoit donc qu'à défaut d'accord, les heures supplémentaires soient majorées de la façon suivante (4) :
- 25% pour les 8 premières heures (soit de la 36ème à la 43ème heure) ;
- 50% pour les suivantes (à partir de la 44ème heure).
Par exemple : si aucun accord collectif n'a été conclu sur ce point, la règle prévue par le Code du travail s'applique. Ainsi, si vous êtes rémunéré 9,76 euros de l'heure (valeur du SMIC horaire brut au 1er janvier 2017), ce montant sera majoré de 25% pour les premières heures et donc vous toucherez non plus 9,76 euros pour ces heures, mais 9,76 + 25%, donc 12,20 euros de l'heure.
Pour les heures supplémentaires suivantes, ce sera le taux de 50% qui s'appliquera, soit 9,76 + 50% = 14,64 euros.
Cependant, si une majoration de 10% est prévue par accord, alors c'est ce taux qui s'applique, même si cela est moins favorable que le principe prévu dans le code.
Donc poursuivons l'exemple ci-dessus, pour toutes les heures accomplies au-delà de 35 heures, vous toucherez 9,76 + 10% donc 10,74 euros pour chaque heure supplémentaire, la différence est donc de taille !
Ainsi, sous couvert d'une plus grande souplesse accordée à la négociation collective, puisque les règles prévues par accord d'entreprise, ou à défaut accord de branche sont prioritaires, la loi n'étant dès lors que supplétive et ne s'appliquant qu'en l'absence d'accord, il s'agit d'une dérégulation des droits des salariés qui peuvent se voir amputés d'une part conséquente de rémunération, si l'entreprise pratique les HS à outrance.
L'abandon de la hiérarchie des normes: Ce qui a beaucoup été décrié et fortement contesté est essentiellement cet accent mis sur les accords d'entreprise : ils peuvent comporter des dispositions moins favorables que les accords de branche par exemple. Donc, une moindre sécurité pour les salariés, même si ces types d'accords répondent à des conditions très précises de validité.
L'autre point problématique porte sur le décompte des heures supplémentaires.
Le Code du travail prévoit que ce décompte se fasse sur la semaine civile (5), c'est-à-dire du lundi 00h00 au dimanche 24h.
Mais il laisse présager que, par accord d'entreprise ou d'établissement ou bien à défaut, par convention ou accord de branche, il peut être prévu que la durée de travail et les heures supplémentaires soient calculées sur une période de 7 jours consécutifs, différente de la semaine civile prévue légalement (6).
Cet accord pourra donc envisager que la semaine débute le dimanche à 00h00 et se termine le samedi à 24h.
Ce n'est qu'à défaut d'accord que le décompte sur la semaine civile s'applique.
L'impact est important si un salarié est amené à faire plus d'heures en fin de semaine qu'en début.
Pour rappel, il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine (7).
Mais si la semaine commence le dimanche à 0h00 et se termine le samedi à minuit, un employeur pourra faire travailler un salarié ayant débuté sa semaine le lundi, tout le week-end qui suit, voire au-delà, tout en ne se trouvant pas en infraction avec la législation.
En effet, le samedi étant comptabilisé sur la semaine écoulée et le dimanche sur la semaine qui débute, il est possible de faire travailler des salariés 12 jours d'affilée sans leur accorder un seul jour de repos, et ce en toute légalité.
Cette spécificité permet également un calcul des heures supplémentaires différent, notamment pour celles effectuées le week-end : elles se trouvent ainsi réparties sur 2 semaines au lieu d'être comptabilisées sur 1 seule.
A noter : les heures de délégations des représentants du personnel sont considérées comme heures supplémentaires donnant lieu à majorations et/ou contreparties en repos dès lors qu'elles sont utilisées en dehors du temps de travail pour l'exercice de leur mandat (8).
Références :
(1) Loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
(2) Article L3121-27 et L3121-28 du Code du travail
(3) Article L3121-33 du Code du travail
(4) Article L3121-36 du Code du travail
(5) Article L3121-35 du Code du travail
(6) Article L3121-32 du Code du travail
(7) Article L3132-1 du Code du travail
(8) Cass. Soc, 12 février 1991, n°88-42353 et Cass. Soc, 25 juin 2008, n°06-46223
Publication: FO CPF, service juridique
( Sourcing Juritravail)
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