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Un film de Bernard Baissat (octobre 2001). Robert Bothereau (22 février 1901 - 31 mai 1985) fut avec Léon Jouhaux, l'un des co-fondateurs de la CGT-Force Ouvrière et le premier Secrétaire général de cette dernière d'avril 1948 à novembre 1963. " Nous continuons la C.G.T. "
Robert Bothereau (22 février 1901 - 31 mai 1985) fut avec Léon Jouhaux, l'un des co-fondateurs de la CGT-Force Ouvrière et le premier Secrétaire général de cette dernière d'avril 1948 à novembre 1963.
APRÈS 2 LOIS SUR L’INSTRUCTION, LES ENFANTS-OUVRIERS MULHOUSIENS RESTENT PRIVÉS D’ÉCOLE
Nous sommes en février 1843, et la tension est vive entre le régime juilletiste et la Société industrielle de Mulhouse (SIM).
2 ans à peine séparent le moment de la première tentative d’une régulation législative sur le travail des enfants dans les manufactures françaises.
Une loi en est issue, mais tout semble encore à faire. Les contentieux demeurent, et la contestation patronale ne faiblit pas. La nouvelle loi fixe un maximum de 8 heures de travail par jour pour les enfants de 8 à 12 ans. Mais la conclusion des membres de la SIM est formelle. Cette loi est « tout à fait incompatible avec les besoins de diverses industries ».
De sorte que les filateurs les plus soucieux de s’en tenir à la loi n’emploient plus d’enfants de moins de 12 ans, mais la plupart des manufacturiers ne s’en soucient guère en vérité.
La patronat mulhousien est protestant. Il pense d’abord en termes d’avantages économiques, et la concurrence déloyale conséquente à la réforme leur pose des problèmes de compétitivité-coût avant même d’éventuels cas de conscience. Mais il comprend tout l’intérêt politique des symboles, et cherche concomitamment à préserver l’esprit pionnier qui fut le sien dans l’adoption de la première législation sociale française.
Les membres de la SIM choisissent alors de s’adresser directement au pouvoir législatif par le biais d’une pétition. Le Ministre en charge et le préfet réagiront, courroucés par l’absence de saisine de l’exécutif, et déniant toute infraction grave à la loi. Le préfet ira jusqu’à accuser le patronat mulhousien de jouer à un tenir jeu, dont il profite en vérité.
Inspecteurs gadgets au travail
Sonne l’heure des inspections ! Une commission d’inspection chargée de l’exécution de la loi sur le travail des enfants dans les manufactures est réunie en séance le 17 février 1843 dans les locaux de la SIM.
Elle est présidée par Charles Doll, sous-préfet d’Altkirch (dont relève Mulhouse) et, accessoirement, beau-frère de Frédéric Engel-Dollfus. Y figurent également deux hommes politiques : François-Antoine Struch, maire de Lutterbach et président du Conseil général, et Alexandre-Louis Rieff de Zu Rhein, maire de Dornach, ainsi que deux représentants de l’industrie. Achille Penot, professeur et membre actif de la SIM, lequel aura beaucoup plaidé pour défendre la nouvelle loi, est absent.
L’impression d’inertie qui ressort du compte rendu de la réunion est frappante. Un membre de la commission, dont l’identité n’est pas révélée, y évoque d’abord de la nécessité d’intervenir en matière d’accidents du travail. Il plaide pour : « cacher les engrenages dont sont obligés de s’approcher les personnes par des espèces de tambours qui n’en gêneraient en rien les mouvements et qui constitueraient au moins une garantie contre les affreux accidents que l’on a déjà eu à déplorer ».
Le plaidoyer est d’autant plus étonnant qu’il n’entre pas du tout dans le champ des dispositions de la loi sur le travail infantile, puisqu’il ne s’agit que d’un contrôle de l’âge et de la durée du travail des enfants. La commission en prend bonne note et promet d’agir pour l’adoption de la mesure.
Enfin, le préfet intervient et « appelle l’attention de la Commission sur la nécessité qu’il y aurait à commencer enfin l’inspection générale des établissements industriels, afin de s’assurer dans cette première inspection si les conditions de la loi s’accomplissent et de donner par cette manifestation officielle l’avertissement officieux aux chefs d’établissement que la loi ne restera pas une lettre morte ».
Près de 2 années après l’adoption de la législation, on peut donc conclure à un aveu d’impuissance publique, doublé d’une extravagante inertie quant au souci de veiller réellement à la bonne application de la loi.
Un premier rapport d’inspection est adressé au préfet le 12 Août 1843. Nous sommes plus de 2 années après adoption de la loi du 22 mars 1841.
Les inspecteurs indiquent que 2 inspections par site ont été effectuées entre mai et juillet 1843. 2 mois et demi espacent chaque visite pour permettre une adaptation de l’industrie, ce qui n’était donc pas le cas lors du premier passage.
Les filatures visitées sont celles de : MM. Jean Kœchlin Dollfus et frère, Naegely, Lauth, Guth, Hirn & Jourdain, Schlumberger, Koechlin, Blech-Fries, et Dollfus-Mieg (aujourd’hui DMC).
Les fabriques d’indiennes, en difficultés pour diverses raisons, emploient relativement peu d’enfants en comparaison de l’industrie du filage, mais sont également visitées. Il s’agit de celles de M.M. Schlumberger, Koechlin, Daniel Schlumberger, Frères Koechlin, Blech-Fries, Dollfus-Mieg, Paraf, et Heilmann-Mantz.
Les inspecteurs mentionnent que la loi est respectée sur la forme : « la loi est affichée dans les ateliers ; les enfants sont munis de livret ; il est tenu un registre où sont inscrits les enfants, leur âge, leur lieu de naissance, le temps qu’ils ont fréquenté l’école, etc. ; si on ne se trouve pas dans les ateliers d’enfants au-dessous de l’âge fixé par la loi, les inspecteurs se sont assurés, en outre, que dans les filatures, on n’emploie plus d’enfants au-dessous de 12 ans ».
Mais, un premier achoppement apparait: « la loi n’est pas exécutée en ce qui concerne la durée journalière de travail. Dans les indienneries, les enfants de 8 à 12 ans, sont occupés souvent au-delà de huit heures ; et dans les filatures, on dépasse généralement d’une heure, le temps fixé par la loi, pour les enfants de 12 à 16 ans ».
Par ailleurs, l’article 6 de la loi du 22 mars 1841 exige qu’il soit inscrit dans chaque livret le temps pendant lequel l’enfant à qui il appartient a fréquenté une école.
Mais là encore, la loi est détournée :
« Nous avons vu des enfants dont il est dit qu’ils ont fréquenté l’école pendant deux mois, un mois, trois jours, un jour ; et il nous a été dit de plusieurs au moins, qu’ils n’y sont plus retournés après avoir obtenu ce certificat. Nous avons pensé que l’attestation du temps qu’un enfant a passé à l’école ne serait qu’une vaine formalité si elle n’avait pas pour conséquence de le faire instruire. Nous avons donc prié les chefs d’établissements d’exiger de temps à autre, tous les deux ou trois mois, par exemple, les certificats constatant que les enfants se rendent assidûment à l’école ».
Enfin, les visites ne se sont bornées qu’à la zone mulhousienne. Les inspecteurs précisant, en guise de justification, que « les occupations de chacun de nous de lui permettant pas de s’absenter pour inspecter les nombreux établissements industriels de l’arrondissement d’Altkirch »…
Rassemblés le 6 décembre 1843 à la SIM, autour d’Emile Dollfus, maire de Mulhouse et héritier de DMC, les industriels mulhousiens cherchent une solution à l’absentéisme des enfants-ouvriers aux cours du soir de l’école communale.
Pour respecter l’article 5 qui oblige les enfants de moins de 12 ans à fréquenter l’école, ainsi que les enfants de 12-16 ans qui n’ont pas encore reçu l’instruction primaire élémentaire, les fabricants remplacent l’école du soir par une école de jour, divisent les enfants en huit classes, dans lesquelles six heures de cours leur seront prodiguées.
Ils instituent une sorte d’augmentation automatique d’effectif à proportion de l’entrée en scolarité: pour 8 enfants fréquentant l’école, un enfant supplémentaire muni d’un certificat de scolarité en bonne et due forme sera embauché.
Enfin, une nouvelle école communale sera construite à Dornach à proximité des usines, notamment de DMC.
135 enfants par classe
Un état des enfants fréquentant l’école communale du soir en décembre 1843 est publié anonymement à Mulhouse.
Le document manuscrit nous apprend que sur un effectif total de 342 enfants, 270 (soit 79 %) la fréquenteraient régulièrement, soit quelques 135 enfants par classe et par jour !
Dans ces conditions, c’est dire le niveau d’inconsistance du dispositif d’instruction, et la nécessité de sa révision lors de la réunion du 6 décembre.
Le document informe également sur l’affectation réelle des enfants. Car 23 % parmi eux restent de fait à la maison, soit pour garder leurs petits frères ou sœurs, soit pour d’autres travaux domestiques, d’autres en très petit nombre sont apprentis (sans doute parce que les autres apprentis ont démarré leur apprentissage à la suite d’une scolarité normale).
Les enfants-ouvriers travaillent dans l’industrie textile. Mais les filatures se mécanisent et emploient moins d’enfants (37 en incluant les cardeurs et bobineurs), surtout des 12-16 ans et des 8-12 ans.
C’est d’abord l’impression manuelle (par les indiennes) qui mobilise les enfants : 212 enfants, soit 62 % de ceux qui fréquentent l’école du soir (et plus de 80 % des enfants-ouvriers). 67% ont moins de douze ans. Ceux-là servent de petites mains pour l’impression manuelle. Ils y sont préparateurs de couleurs qu’ils apportent aux imprimeurs en zigzaguant entre les tables de préparation.
1847/1848
Un nouveau projet de loi généralisant la limitation du temps de travail pour tous
La chambre des pairs prépare un projet de loi visant à limiter à 12h le travail des ouvriers en général, sur lequel la SIM est appelée à se prononcer en avril 1847.
La perspective est rejetée s’agissant d’adultes. La commission de la SIM reconnait toutefois la nécessité d’une limitation du travail de nuit et le repos dominical, mais la santé du personnel, évoquée pour la forme, est toujours subordonnée à l’état de la production manufacturière.
En fait, tout l’intérêt réside dans le motif pour le moins étrange du rejet de cette limitation. Il rend compte de la perception aiguë des industriels à constater l’incapacité foncière d’un modèle économique, dont ils sont eux-mêmes les fourriers, à servir autre chose que le lucre et l’exploitation à outrance du personnel : enfants, femmes et hommes confondus, en lieu et place de la philanthropie dont ils se voulaient les promoteurs institués.
Car ce que redoutait par-dessus-tout la SIM, et cela bien avant l’adoption de la loi de 1841, est la distorsion de concurrence, directement induite par l’incapacité de l’État à faire effectivement appliquer des lois sociales.
Il faut donc agir, mais dans des proportions mesurées, bien entendu, car il ne s’agirait toutefois pas de « fournir des armes qui peuvent se retourner contre » leurs intérêts.
C’est la raison pour laquelle les membres de la SIM plaident la nécessité de professionnaliser le contrôle de la bonne application des lois sociales nouvelles, surtout dans la perspective d’une généralisation de la journée de 12 heures.
Pour autant, ils ne seraient que six contrôleurs pour surveiller ces vaillants producteurs dans toute la France, et ne feraient leurs tournées que pendant six mois, car il ne s’agit pas de « créer des sinécures à des personnes bien appuyées ». Et dire qu’avant même qu’elle n’existe formellement, l’Inspection du travail était déjà vue comme une sinécure…
S’agissant des enfants, les avis sont très partagés. Certains plaident pour 8 heures d’autres pour 12 heures à partir de 8 ans.
Le projet de loi de 1848 reprend l’essentiel des propositions de la SIM :
Système de demi-journée de 6 heures pour les 8-12 ans facilitant les relais dans les filatures et la fréquentation de l’école.
Extension aux filles des 12 heures de travail maximum par jour pour les 12-16 ans
Introduction d’un enseignement religieux le dimanche
Création d’un corps d’inspecteurs salariés
Troisième Révolution française
Le projet sera adopté par les pairs le 21 février 1848, soit la veille du déclenchement de la Révolution de février. Celle-ci, mettant fin au processus parlementaire, elle repousse aussitôt l’adoption ce qui devait servir de révision à la loi de 1841. C’est donc dans le cadre de la 2ème République que celle-ci sera adoptée le 9 septembre 1848.
Mais dans l’entretemps, le 2 mars 1848, un décret du gouvernement provisoire limite la journée de travail à 10 heures à Paris et à 11 heures en province.
C’est toujours au nom de la libre concurrence, ce paravent du pouvoir bourgeois, que cette mesure est mise en cause par l’Assemblée constituante élue le 23 avril 1848. On acte alors le retour aux 12 heures.
Un magnifique discours fut prononcé par le député Agricol Perdiguier, en défense du décret du 2 mars, « conquête des ouvriers », dans lequel il fustigeait (déjà) les « économistes ». Il rend parfaitement compte de la condition salariale au mitan du 19ème siècle.
Même votée a minima, la législation de septembre 1848 semble rester lettre morte. Raison pour quoi la SIM insiste auprès du préfet du Haut-Rhin, dans une lettre-pétition adressée au représentant de ce qui est devenu l’Empire de Napoléon III.
La loi est généralement appliquée dans le département affirme le texte, mais « il paraîtrait qu’il n’en est pas ainsi malheureusement sur tous les points de l’Empire ». C’est un plaidoyer pro domo qu’adresse la SIM à l’autorité administrative : « La Société industrielle de Mulhouse ne peut pas être indifférente à une question si essentielle à l’amélioration morale et physique des ouvriers, qu’elle a soulevé la première en France ».
Et c’est au nom d’une opportune communauté d’intérêt “interclassiste” qu’elle choisit d’« appeler la sérieuse attention du Gouvernement sur l’insuffisance des moyens aujourd’hui en vigueur; lorsqu’il s’agit d’assurer partout et uniformément l’exécution des lois précitées, également favorables aux industriels et aux ouvriers , dont les intérêts sont communs et inséparable ».
Enfin, la SIM joint à son courrier deux exemplaires du rapport et de la pétition qu’elle a adressée le 4 Mai 1852 au Ministre de l’intérieur, de l’agriculture et du commerce, pour y protester contre l’abus du travail de nuit dans les établissements qui emploient des « moteurs à vapeur ou hydrauliques ».
10 années de perdu !
Plus d’une décennie passera sans que rien ne change fondamentalement. C’est en 1863 seulement, que Jean Dollfus, nouveau maire de Mulhouse, et patron de DMC, reprend l’initiative au travers du bulletin de la SIM. C’est un texte essentiel à plus d’un titre. Car outre le détail des insuffisances législatives sur la vie et le quotidien des enfants ouvriers, on perçoit une certaine amertume de la part de l’héritier Dollfus.
Le représentant de la philanthropie patronale mulhousienne se heurte à ses propres paradoxes. Le grand patron, par cas de conscience, scrupule, voire par calcul politique, ne songe pas même à les taire.
Il y rappelle l’ensemble des mesures proposées par l’association mulhousienne, et s’appuie pour ce faire sur « l’intérêt de la classe ouvrière », en vue d’«assurer son développement physique et intellectuel ».
Mais il songe d’abord et surtout au sort des enfants. Et il y expose un comparatif avec l’Angleterre :
« On comprend facilement combien un travail aussi prolongé pour des enfants d’un âge aussi peu avancé devient nuisible. Il empêche le développement physique autant que celui de l’intelligence, par suite de l’absence souvent complète de toute instruction, et si nous avons à nous plaindre de ce que nos ouvriers adultes ne valent pas les ouvriers d’autres grands pays manufacturiers, ceux de l’Angleterre surtout, soyez persuadés que les lois qui régissent le travail dans les deux pays en sont la principale cause ».
Dollfus dresse par la suite un tableau épouvantable, en même temps que lucide, de la situation des enfants mulhousiens, au regard des obligations d’instruction que prévoient pourtant la loi applicable :
« J’ai voulu me rendre compte du degré d’instruction de la population de Mulhouse. — 3,000 enfants environ fréquentent l’école primaire ; ils y sont admis dès qu’ils ont 6 ans. — Aujourd’hui, à l’école des garçons, 524 fréquentent les classes de la première année ; 423 celles de la seconde ; aux classes de troisième année ils ne sont plus que 355, et en quatrième 264. Vous voyez donc que plus de la moitié des enfants qui fréquentent l’école ne la suivent pas plus de trois ans, pas au-delà de la neuvième année ; pourquoi ? Parce que les parents ont besoin du gain de leur travail ; ils les envoient dans les fabriques, où l’instruction, comme je viens de vous le dire, la plupart du temps ne se donne pas ou ne se donne que très imparfaitement, et le peu que les enfants apprennent pendant deux ou trois ans est ensuite à peu près complétement oublié, quand ils sont adultes. Et encore si tous suivaient l’école pendant deux ou trois ans seulement, cette instruction première pourrait être développée, chez les adultes, par des cours du soir ou du dimanche ; mais nous savons que 1500 à 2000 enfants ne suivent aucune école. Nous savons que sur 500 à 600 du culte catholique qui font leur première communion chaque année, la moitié ne savent ni lire ni écrire ».
Voici un bref rappel des positions de la SIM, défendues depuis 1847: 6 heures de travail pour les 8-12 ans organisées en demi-journée pour que la règle soit plus claire et respectée (ils travaillent 8 heures en 1863), généralisation de la gratuité scolaire comme elle l’est (presque complètement) à Mulhouse, instruction obligatoire jusqu’à 12 ans pour les enfants-ouvriers, construction d’écoles communales en lieu et place des écoles de fabriques, institution d’un corps d’inspecteurs-salariés des conditions de travail, parce que « la loi continue à être éludée à peu près partout », ainsi que le rappelle Dollfus, qui déplore que la tornade révolutionnaire de 1848 ait fait avorter une réforme ambitieuse.
Mais Dollfus n’élude rien du hiatus patent entre les belles déclarations d’intention et la réalité des faits : la loi échappe de fait à tout contrôle. Les enfants les plus jeunes ne sont certes quasiment plus employés dans les filatures (mais le travail y est resté extrêmement éprouvant), car les métiers à tisser se sont massivement mécanisés. Mais tel n’est pas le cas dans les fabriques d’indiennes, dont DMC fait également partie. La ressource infantile est plus que jamais nécessaire aux yeux des manufacturiers.
Le respect de la loi en matière d’instruction est donc tout à fait aléatoire, et Dollfus ne le dissimule pas.
La réalité sociale décrite par Dollfus semble survivre au continuum historique. De sorte que quand il écrit : « Je dois ajouter à ce tableau, déjà bien sombre, que la commune de Mulhouse, d’après une statistique récemment faite, est celle de tout le département où l’instruction est la moins avancée ; la plus pauvre commune rurale a plus d’enfants suivant l’école que la nôtre », cela raisonne cruellement aux oreilles des mulhousiens contemporains que nous sommes, car les difficultés scolaires les plus marquées continuent encore aujourd’hui à se concentrer dans ses murs.
Cela dit, même si la SIM reste un aiguillon défendant la cause des enfants ouvriers au niveau national, elle continue de se montrer extrêmement pondérée sur le sujet, comme le montre encore un courrier du 5 février 1866, dans lequel la SIM répondant à un projet de réforme de l’enseignement, réaffirme son désaccord sur l’élévation de la limite d’âge à 10 ans pour exercer un travail, et sur la limitation à 10 heures des 13-16 ans, ce qui désorganiserait à son sens la production.
Sourcing:Camille DUMEUNIER, in L'alterpresse68
Article du | 5 octobre, 2019 | Mulhouse et environs
Grève générale en Suisse de 1918 : Photo prise sur la Paradeplatz de Zurich avec des manifestants et des cavaliers de l’armée face à face. (CC0 1.0)
Histoire sociale
La grève générale suisse de 1918
La Confédération helvétique n’est pas que le pays des banques, de la Croix rouge et des fromages fondus. C’est aussi une terre de lutte des classes dans un contexte politique et sociologique difficile.
En ce début du XXe siècle la Suisse est loin d’être un pays de cocagne. En 1914, la durée du travail hebdomadaire y est encore de 59 heures. L’exode rural s’accélère et la classe ouvrière atteint le million et demi. Des travailleurs sous payés, mal logés, sans assurance maladie. A la veille de la Grande guerre, les associations ouvrières regroupent 250 000 membres, dont 90 000 dans les syndicats proprement dits. Avec la guerre, la Suisse ne peut plus s’approvisionner chez ses voisins et l’inflation touche tous les produits de première nécessité. Dès 1916 les cartes de rationnement font leur apparition, ainsi que le marché noir.
Le mouvement ouvrier suisse s’est quant à lui organisé très tôt. L’AIT (Alliance internationale des travailleurs) ou Première Internationale, fondée en 1864, organise son premier congrès à Genève en 1866 et le second à Lausanne l’année suivante, profitant de l’implantation de quatre puissantes sections (Genève, Lausanne, Vevey et Montreux).
Quand Marx exclut les anarchistes de l’AIT en 1872, c’est de Suisse que vient la contre-offensive. La puissante Fédération jurassienne, derrière James Guillaume, fonde l’Internationale anarchiste à Saint-Imier le 15 septembre de la même année, rejointe par les Espagnols, les Italiens, des Russes et des Français.
Les Jurassiens sont composés essentiellement d’ouvriers horlogers syndiqués, rejoints par des réfugiés de la Commune de Paris. Mais les ouvriers alémaniques restent majoritairement fidèles au socialisme-marxiste.
Avec la Première Guerre mondiale, la Suisse mobilise son armée pour défendre sa neutralité ce qui aggrave la situation économique et sociale, et militarise la société. Les 27-28 juillet 1918, le Parti socialiste, l’Union syndicale et l’Union fédérative des fonctionnaires se réunissent à Olten, demandant la journée de 8 heures, la fin du contrôle policier sur la presse, les réunions et les manifestations et une revendication plus internationaliste : l’abrogation de l’arrêté fédéral ordonnant que les déserteurs (français, allemands, austro-hongrois, italiens) soient repoussés de l’autre côté de la frontière. Des syndicats de soldats suisses apparaissent dans les 4e et 5e divisions [1] en ce mois de juillet.
LA PREMIÈRE GRÈVE GÉNÉRALE DE L’HISTOIRE SUISSE
Face à l’agitation ouvrière dans les villes, le Conseil fédéral mobilise des troupes dans les villages ruraux début novembre. Le 9, Zürich et Berne sont occupées par la troupe. Le jour même, le Comité l’Olten appel à une grève d’une journée, largement suivie. L’Union ouvrière de Zürich déclare alors la grève générale dans tout le canton.
Le 11, l’USS (Union syndicale suisse) étend le mouvement à tout le pays, demandant la semaine des 48 heures, la réorganisation de l’armée dans le sens « d’une armée populaire », une assurance vieillesse pour tous et le monopole de l’État sur les importations et les exportations. Le nombre des grévistes atteint rapidement les 250 000, alors que le Conseil fédéral mobilise 50 000 hommes, mobilisation entravée par les cheminots grévistes.
Alors que les fusils viennent juste de se taire de par le monde, l’Assemblée fédérale se réunit en urgence le 12 novembre à 11 heures. Elle refuse de négocier et envoie les paysans villageois et les militaires d’origine paysanne remplacer les grévistes. Le 15, l’USS accepte la reprise tout en déclarant : Les ouvriers ont dû céder à la puissance des baïonnettes. Le 1er février 1919, le clergé protestant remercie l’armée en la cathédrale de Lausanne pour avoir rétabli l’ordre bourgeois.
Deux mois plus tard les leaders du Comité d’Olten passent en jugement et sont condamnés à de la prison. Malgré l’échec de la grève générale, les autorités ébranlées par ce premier grand mouvement revendicatif durent lâcher du lest : introduction de la proportionnelle aux élections fédérales, ce qui permit au Parti socialiste de passer de 19 à 43 députés au parlement de Berne lors des élections de fin 1919, semaine des 48 heures et congés payées pour une partie des travailleurs du public.
Le nombre de syndiqués passa de 90 000 en septembre 1918 à 175 000 en janvier 1919. Bref, une réelle avancée dans un contexte particulièrement difficile.
Notes
[1] L’armée suisse est une armée de citoyens qui font deux ans de service militaire, puis des périodes de plusieurs mois jusqu’à l’âge de 55 ans. Chaque citoyen-soldat emporte son arme et son paquetage chez lui après ses périodes.
En juillet 1914 était assassiné Jean Jaurès (3 septembre 1859 – 31 juillet 1914).
“ Vous tenez en vos mains l'intelligence et l'âme des enfants. "
Cet homme s’est engagé en politique afin de suivre les traces des principes républicains défendus par Jules Ferry.
Fervent admirateur et défenseur de l’école publique et de ses « hussards noirs » de la République, il considère l’éducation des citoyens comme le socle de la consolidation républicaine ainsi qu’une valeur essentielle au socialisme.
Lui qui fut également professeur rend de nombreux hommages à cette profession – rouage, à ses yeux, d’une société future plus juste et plus égalitaire.
Lettre ouverte
La Dépêche de Toulouse,
15 janvier 1888.
Vous tenez en vos mains l’intelligence et l’âme des enfants ; vous êtes responsables de la patrie.
Les enfants qui vous sont confiés n’auront pas seulement à écrire, à déchiffrer une lettre, à lire une enseigne au coin d’une rue, à faire une addition et une multiplication. Ils sont Français et ils doivent connaître la France, sa géographie et son histoire : son corps et son âme. Ils seront citoyens et ils doivent savoir ce qu’est une démocratie libre, quels droits leur confèrent, quels devoirs leur impose la souveraineté de la nation.
Enfin ils seront hommes, et il faut qu’ils aient une idée de l’homme, il faut qu’ils sachent quelle est la racine de nos misères : l’égoïsme aux formes multiples ; quel est le principe de notre grandeur : la fermeté unie à la tendresse. Il faut qu’ils puissent se représenter à grands traits l’espèce humaine domptant peu à peu les brutalités de la nature et les brutalités de l’instinct, et qu’ils démêlent les éléments principaux de cette oeuvre extraordinaire qui s’appelle la civilisation. Il faut leur montrer la grandeur de la pensée ; il faut leur enseigner le respect et le culte de l’âme en éveillant en eux le sentiment de l’infini qui est notre joie, et aussi notre force, car c’est par lui que nous triompherons du mal, de l’obscurité et de la mort.
Eh ! Quoi ? Tout cela à des enfants ! – Oui, tout cela, si vous ne voulez pas fabriquer simplement des machines à épeler… J’entends dire : « À quoi bon exiger tant de l’école ? Est-ce que la vie elle-même n’est pas une grande institutrice ? Est-ce que, par exemple, au contact d’une démocratie ardente, l’enfant devenu adulte, ne comprendra pas de lui-même les idées de travail, d’égalité, de justice, de dignité humaine qui sont la démocratie elle-même ? » – Je le veux bien, quoiqu’il y ait encore dans notre société, qu’on dit agitée, bien des épaisseurs dormantes où croupissent les esprits.
Mais autre chose est de faire, tout d’abord, amitié avec la démocratie par l’intelligence ou par la passion. La vie peut mêler, dans l’âme de l’homme, à l’idée de justice tardivement éveillée, une saveur amère d’orgueil blessé ou de misère subie, un ressentiment ou une souffrance. Pourquoi ne pas offrir la justice à nos cœurs tout neufs ? Il faut que toutes nos idées soient comme imprégnées d’enfance, c’est-à-dire de générosité pure et de sérénité.
Comment donnerez-vous à l’école primaire l’éducation si haute que j’ai indiquée ? Il y a deux moyens. Tout d’abord que vous appreniez aux enfants à lire avec une facilité absolue, de telle sorte qu’ils ne puissent plus l’oublier de la vie, et que dans n’importe quel livre leur oeil ne s’arrête à aucun obstacle. Savoir lire vraiment sans hésitation, comme nous lisons vous et moi, c’est la clef de tout…. Sachant bien lire, l’écolier, qui est très curieux, aurait bien vite, avec sept ou huit livres choisis, une idée très haute de l’histoire de l’espèce humaine, de la structure du monde, de l’histoire propre de la terre dans le monde, du rôle propre de la France dans l’humanité.
Le maître doit intervenir pour aider ce premier travail de l’esprit ; il n’est pas nécessaire qu’il dise beaucoup, qu’il fasse de longues leçons ; il suffit que tous les détails qu’il leur donnera concourent nettement à un tableau d’ensemble.
De ce que l’on sait de l’homme primitif à l’homme d’aujourd’hui, quelle prodigieuse transformation ! Et comme il est aisé à l’instituteur, en quelques traits, de faire, sentir à l’enfant l’effort inouï de la pensée humaine ! Seulement, pour cela, il faut que le maître lui-même soit tout pénétré de ce qu’il enseigne. Il ne faut pas qu’il récite le soir ce qu’il a appris le matin ; il faut, par exemple, qu’il se soit fait en silence une idée claire du ciel, du mouvement des astres ; il faut qu’il se soit émerveillé tout bas de l’esprit humain qui, trompé par les yeux, a pris tout d’abord le ciel pour une voûte solide et basse, puis a deviné l’infini de l’espace et a suivi dans cet infini la route précise des planètes et des soleils ; alors, et alors seulement, lorsque par la lecture solitaire et la méditation, il sera tout plein d’une grande idée et tout éclairé intérieurement, il communiquera sans peine aux enfants, à la première occasion, la lumière et l’émotion de son esprit.
Ah ! Sans doute, avec la fatigue écrasante de l’école, il est malaisé de vous ressaisir ; mais il suffit d’une demi-heure par jour pour maintenir la pensée à sa hauteur et pour ne pas verser dans l’ornière du métier. Vous serez plus que payés de votre peine, car vous sentirez la vie de l’intelligence s’éveiller autour de vous.
Il ne faut pas croire que ce soit proportionner l’enseignement aux enfants que de le rapetisser. Les enfants ont une curiosité illimitée, et vous pouvez tout doucement les mener au bout du monde. Il y a un fait que les philosophes expliquent différemment suivant les systèmes, mais qui est indéniable : « Les enfants ont en eux des germes de commencements d’idées. » Voyez avec quelle facilité ils distinguent le bien du mal, touchant ainsi aux deux pôles du monde ; leur âme recèle des trésors à fleur de terre ; il suffit de gratter un peu pour les mettre à jour. Il ne faut donc pas craindre de leur parler avec sérieux, simplicité et grandeur.
Je dis donc aux maîtres pour me résumer : lorsque d’une part vous aurez appris aux enfants à lire à fond, et lorsque, d’autre part, en quelques causeries familières et graves, vous leur aurez parlé des grandes choses qui intéressent la pensée et la conscience humaine, vous aurez fait sans peine en quelques années œuvre complète d’éducateurs. Dans chaque intelligence il y aura un sommet, et, ce jour-là, bien des choses changeront.
Jean Jaures
La Dépêche de Toulouse, 15 janvier 1888.
Sourcing:
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Texte toujours d'actualité pour la rentrée scolaire.
Il y a plus de 130 ans, le 23 juillet 1888, dans un estaminet de Lille, la chorale de la "Lyre des Travailleurs" chante un superbe poème du communard Pottier, mis en musique par Degeyter.
Les premières mesures de "L'Internationale" feront vite le tour du monde.
Ce chant d'espoir formidable sera présent dans toutes les luttes des travailleurs.
Le poème d'Eugène Pottier est écrit juste après l'écrasement de la Commune en juin 1871 et sera dédié à un autre communard anarchiste comme lui et autre personnalité de la Commune.
Dès les origines, le mouvement ouvrier en général et le mouvement syndical en particulier se sont battus pour lutter contre l’exploitation dans le domaine du temps de travail : réduction des horaires hebdomadaires, droit aux congés payés, donc droit au repos et aux loisirs.
Dès sa fondation en 1895, la CGT a pour slogan « 8 heures de travail, 8 heures de loisirs, 8 heures de sommeil ».
Il faut attendre la loi du 13 juillet 1906 pour que les ouvriers et les employés de commerce obtiennent le repos dominical obligatoire. Quant à la majorité laborieuse paysanne, elle continuera à ne pas compter ses heures.
C’est avec le Front populaire que le monde du travail va enfin pouvoir souffler un peu et se reposer. Les 12 et 14 juin 1936, le Parlement vote la loi sur les 40 heures hebdomadaires et les deux semaines de congés payés.
Les premières vacances de la classe ouvrière française ont été et resteront le symbole le plus fort pour l’ensemble du monde du travail. Pour la première fois un vent de liberté s’est levé et pas simplement au sens figuré.
En juillet 1936, 600 000 ouvriers et leurs familles découvrent la mer, la campagne, les loisirs. Ils partent sur les routes, à pied, à vélo, en chemin de fer.
La presse de droite, effrayée, parle même de ces salopards à casquette qui souillent nos plages.
Jusqu’à la veille de la guerre on assiste à une floraison de maisons de la culture, au « Ciné-liberté », au développement des fédérations sportives du travail, du camping, des auberges de jeunesse, des gîtes ruraux…
Des acquis à défendre
Si ce droit aux loisirs va dans le sens du progrès et des droits fondamentaux de l’Homme, il n’en reste pas moins régulièrement remis en cause.
En mars 1956, les Français obtiennent la troisième semaine de congés payés, puis la quatrième en mars 1969 et enfin la cinquième en janvier 1982.
Quant à la semaine de 40 heures, elle passe à 39 en 1982 puis à 35 (par deux lois, en 1998 et 2000). Mais dès 2002, les 35 heures, qui sont devenues obligatoires pour toutes les entreprises – mais qui n’ont jamais fait l’objet d’une compensation suffisante en termes de créations d’emplois – sont attaquées.
Si les cinq semaines de congés payés résistent toujours, chômeurs et précaires n’en bénéficient pas et avec la baisse du pouvoir d’achat les vacances fondent comme neige au soleil. On part moins longtemps, moins loin et plus souvent dans la famille, quand on a la chance d’en avoir encore !
En 2001, 40 % des Français ne partaient pas en vacances. La barre des 50 % était franchie en 2009. Mais il ne s’agit que d’une moyenne. Aujourd’hui, près de 20 millions de Français aux revenus modestes ne partent pas en vacances.
Les attaques récentes
Le repos dominical est attaqué dès le 30 janvier 2003 par une proposition de loi d’un certain Patrick Balkany qui souhaite l’ouverture du dimanche pour tous les commerces de détail.
Le 30 juin 2004, le gouvernement Raffarin instaure la « journée de solidarité », rendant le lundi de Pentecôte travaillé, (non rémunéré), mesure qui ne touche, comme d’habitude, que les salariés.
La France a été le premier État moderne à inscrire la séparation de l’église et de l’État dans le marbre de sa constitution. La laïcité à la française reste encore de nos jours un exemple quasi unique dans le monde.
Cette loi, voulue par le « petit père Combes » et votée à l’initiative d’Aristide Briand, prend ses racines dans les tréfonds de l’histoire de France : les guerres de religion, les lumières contre l’obscurantisme, la Révolution française de 1789, l’affaire Dreyfus, la montée des idées républicaines et sociales.
Context / Chronologie:
De la Saint-Barthélémy (1572) à la révocation de l’édit de Nantes (1685), la France s’est déchirée et massacrée pendant plus d’un siècle. La Révolution française a mis fin aux privilèges de la noblesse, mais aussi d’un clergé qui s’opposait à l’émancipation du peuple en particulier dans le domaine de l’éducation.
La première séparation date du 18 septembre 1794 quand le budget de l’Église constitutionnelle est supprimé.
Mais en 1802, Napoléon signe le concordat avec le pape et rétablit le catholicisme comme religion d’État. L’Église de France, en particulier sa hiérarchie, prend ouvertement fait et cause pour les régimes antirépublicains (royauté, empire) puis contre toutes les nouvelles idées socialistes.
Les droites ont eu très peur des révolutions de 1848, en particulier celle de juin et dès 1850, elles imposent la loi Falloux qui proclame la liberté d’enseignement au profit de l’église.
Mais à la fin du XIXe siècle, les Républicains, Radicaux et Radicaux-socialistes accèdent au pouvoir. D’autant que l’affaire Dreyfus (1894-1906) va rouvrir les cicatrices entre les milieux réactionnaires-catholiques et les adeptes des avancées de la Révolution française, désormais largement influencés par le socialisme.
C’est Émile Combes qui sera un des symboles de la bataille pour la laïcité. Né dans une famille modeste du Tarn, médecin installé en Charente, radical-socialiste, Franc-maçon, il est le président du groupe de la « Gauche Démocratique » au Sénat et ministre de l’instruction publique et des cultes en 1895.
En tant que Président du conseil (Premier ministre) de juin 1902 à janvier 1905, il va lancer une vaste campagne anticléricale : fermeture de 3 000 écoles congrégationnistes en juillet 1902, rupture des relations diplomatiques avec le Vatican en mai 1904 et interdiction totale d’enseigner aux congrégations en juillet 1904.
De la laïcité
Les fondements théoriques de la loi de 1905 viennent essentiellement des planches et du travail en loges des Frères du Grand Orient de France, obédience majoritaire en France, largement athée ou agnostique, très influente chez les radicaux et radicaux-socialistes de la IIIe République.
Mais cette loi promulguée le 9 décembre 1905 [1] n’est pas une loi d’exclusion et de mise au ban des catholiques.
Sa première phrase est : « La République assure la liberté de conscience ».
C’est aussi cette introduction qui lui vaudra le soutien total des protestants et des juifs [2].
Par ailleurs, la République ne reconnaît, ne salarie ni de subventionne aucun culte. La loi de séparation contient donc des dispositions libérales : respect de la liberté de conscience, du libre exercice des cultes et de l’organisation interne des religions. Désormais être adepte d’une religion ou être athée relève d’un choix individuel.
Il ne doit pas non plus être demandé de service public aux différents cultes et les services publics de l’État ne doivent porter aucune marque de caractère religieux.
Le Vatican menace d’excommunier les députés et sénateurs qui ont voté la séparation. La belle affaire pour la plupart ! Ce n’est qu’en 1923 que la hiérarchie catholique française va accepter la laïcité, mais pour mieux se ranger à 80% derrière Pétain.
En 1946, la constitution de la IVe République qualifie la France de « République laïque » et indique que l’organisation de l’enseignement public, gratuit et laïque à tous les degrés, est un devoir de l’État.
C’est d’ailleurs sur le terrain scolaire que les milieux cléricaux tentent encore de nos jours de saper la laïcité.
Sourcing:CHRISTOPHE CHICLET, in fo.fr
Notes
[1] - Votée à l’Assemblée nationale par 341 voix contre 233 et au Sénat par 181 contre 102.
[2] - Ce qu’il reste des protestants après l’exil de dizaines de milliers d’entre eux après la révocation de l’édit de Nantes par Louis XIV, se divise en deux courants : calvino-swingliste et luthérien, réunifiés en 2013. A l’époque la communauté juive est très majoritairement ashkénaze. La minorité séfarade est constituée des « Juifs du pape », et de ceux venus d’Italie, d’Espagne et du Portugal. Les Séfarades deviendront majoritaires en France à l’indépendance du Maroc, de la Tunisie et de l’Algérie.
L’une des plus belles figures de la classe ouvrière, Jean-Baptiste Clément vit aujourd’hui dans la mémoire de tous ceux qui l’ont connu et de tous ceux qui ont appris à admirer son sublime désintéressement, son héroïsme indomptable, et à aimer sa poésie tour à tour tendre, âpre et exaspérée. Il est devenu célèbre par sa romance Le temps des cerises, écrit, il y a près de quatre-vingt dix ans, qui n’a pas encore perdu ni son charme mélancolique, ni sa signification humaine.
J.-B. Clément ne pouvait relire ou entendre sans émotion et sans larmes ses propres vers :
« J’aimerai toujours le temps des cerises - C’est de ce temps-là que je garde au cœur - Une plaie ouverte... »
Il a, en effet condensé dans ces lignes toute la misère de sa jeunesse, la souffrance de ses années de luttes, son chagrin et ses déceptions. Et par ce qu’il a conservé le douloureux. souvenir au fond de son coeur viril, et sentimental à la fois, qu’il est devenu un combattant intrépide du prolétariat, un exemple émouvant de noblesse d’âme et de générosité.
J.-B. Clément était né pour la lutte sociale ; sa détresse et les injustices qu’il a endurées, avaient mûri et formé sa conscience révolutionnaire. Sa vie, très mouvementée, fut entièrement mise au service de l’idéal de la classe ouvrière, comme sa poésie bouillonnante, nerveuse qui se confondait avec la révolte intérieure et l’espoir des hommes humiliés et opprimés.
On ne peut évoquer cette existence ardente et tumultueuse, qui se passionna jusqu’à sa mort pour la cause socialiste, et sa poésie qui vibrait et s’exaltait pour un meilleur avenir de tous ceux qui souffraient et qui voulaient être heureux parce qu’ils aimaient la vie.
Jean-Baptiste Clément, avant d’être le poète-chansonnier célèbre du prolétariat, a fait toutes sortes de métiers : tourneur en cuivre, employé chez un architecte, chez un négociant en vin, puis manœuvre à la construction du viaduc de Nogent.
A vingt et un ans, il s’insurge contre la tyrannie et l’exploitation patronales ; compose des poèmes avec une spontanéité naturelle et prend conscience de sa véritable vocation.
En même temps, sa soif de culture s’éveille, que des lectures médiocres ne peuvent plus satisfaire. Il se rend compte de son ignorance et Clément travaille le jour, étudie la nuit, éclairé par une lampe à huile. « Autodidacte, écrivait-il, je devais passer par trente-six métiers et bien plus de misères pour m’instruire ! »
II lit les œuvres de Balzac, de Flaubert, de Musset et la poésie de l’infortuné Hégésippe Moreau et de Béranger. Mais, c’est les vers enflammés de Pierre Dupont qui exercent sur lui une profonde attraction. A cette époque, il écrit des couplets nostalgiques et délicieux que seuls ses amis intimes connaissent, et il vit à la Butte Montmartre, dans une misère lamentable.
Puis, vient le jour heureux... lorsqu’il a vendu à l’éditeur sa première chanson pour cent sous. II n’a jamais oublié l’étrange émotion qu’il avait ressentie alors. Encouragé par ce début de succès, il composa les Chansons du morceau de pain, jugées par lui « sans importance », mais qui révèlent un authentique poéte chansonnier du peuple.
Dans les couplets rythmiques, tantôt satiriques, tantôt révolutionnaires : La chanson du Fou, Folie de Mai, Fournaise, Les Souris, L’Empereur se dégomme, Paysan, Quatre-Vingt-Neuf, il évoque la misère noire, le régime haï et détesté de Napoléon III, le souvenir frémissant de 89, la colère et l’inquiétude du peuple, que la censure impériale avait interdit et pour lesquels il fut emprisonné à Sainte-Pélagie.
Lorsqu’en 1867, la chanson du Temps des .Cerises, sur la musique de Renard, fut éditée à Bruxelles, le nom de Clément devint rapidement populaire en France. Et c’est dans une nouvelle édition de 1885 que Clément l’a dédiée : « à Louise Michel, l’ambulancière de la rue Fontaine-au-Roi, le dimanche 28 mai 1871. »
Dans le mouvement d’émancipation de la Commune, J.-B. Clément prend une part active et se bat courageusement sur les barricades.
C’est dans sa cachette quai de Bercy qu’il écrivit, pendant les jours tragiques de la répression, les strophes déchirantes de La semaine sanglante :
« Paris suinte la misère - Les heureux mêmes sont tremblants - La mode est aux conseils de guerre - Et les pavés sont tous sanglants... »
Après la défaite de la Commune, il est contraint de s’exiler en Angleterre, où il végète, en donnant des leçons de français. En pensant aux trente-cinq mille communards massacrés, à ses amis fusillés et déportés à la Nouvelle-Calédonie, Clément met « la chanson au service, de la cause des vaincus et veut peindre dans un style simple et direct, les souffrances et les revendications des ouvriers ».
Les événements de 1871 m’ont convaincu - écrivait-il - qu’il fallait par les paroles et les chansons, forcer le peuple à voir sa misère, à hâter ainsi l’heure de la solution du grand problème social. C’était, le but immédiat de ses chansons et de sa poésie.
Et c’est ainsi qu’est né de l’inspiration socialiste : Les Traîne-Misére, à Mon Marteau, Le Diable.
A son retour en France il compose Les Gueux, aux Loups, Jean Rat, Liberté-Egalité, poèmes émouvants par la sincérité de l’émotion et de l’accent, par la force de l’expression et par la sensibilité humanitaire.
Dans ses chansons sociales : Le Trimardeur, La Grève, Crève-Coeur, Chômage, En avant paysan, Le Premier mai, il apparaît de plus en plus le poète engagé, en lutte contre la résignation, l’ignorance et la pauvreté, en exhortant les travailleurs aux combats pour une société régénérée.
J.-B. Clément était redouté aussi comme pamphlétaire sous le règne de Napoléon III. Il a écrit avec une verve mordante, le Casse-Tête, le Pavé, Le club de la Redoute, La Lanterne Impériale, La Lanterne du Peuple, où il a fustigé avec une plume incisive et gouailleuse, les institutions réactionnaires de l’Empire libéral et eut le courage de dire en 1868 :
« Place à ceux qui ont l’amour de la liberté ! Il nous faut des hommes nouveaux et des idées nouvelles. »
Les deux volumes de Questions sociales, contiennent la doctrine démocratique de cet admirable poète-militant qui dénonçait les maux organiques et les vices internes de la société bourgeoise, et annonçait avec ferveur, la société socialiste où « il n’y aura plus d’inégalités, où le travailleur ne sera plus esclave du capitalisme et l’homme ne sera plus exploité ».
Cette conception élevée de la société future, lui a donné une raison de vivre et une raison d’espérance.
Article de Théodore Beregi paru dans Force Ouvrière n°379, daté du 23 avril 1953
Les grandes dates de Notre-Dame de Paris, au cœur de l’histoire de France
Le monument historique a été ravagé par un incendie lundi 15 avril 2019.
Retour sur l’histoire de la cathédrale la plus célèbre du monde, depuis sa construction au XIIe siècle jusqu’aux travaux de rénovation lancés en 2017.
Des millions de visiteurs venaient admirer sa flèche qui pointait vers les cieux, les vitraux de ses rosaces et ses fameuses gargouilles. Nourris par l’imaginaire de Victor Hugo, sans doute rêvaient-ils d’y croiser Quasimodo, Esmeralda et Frollo.
Lundi 15 avril, ces rêves sont partis en fumée lorsqu’un incendie s’est déclenché dans la cathédrale Notre-Dame de Paris en fin d’après-midi.
Si les pompiers ont pu sauver et préserver la structure dans sa globalité, les deux tiers de la toiture ont été détruits.
Retour sur les épisodes marquants de l’histoire de France qui se sont écrits entre les murs de la plus célèbre cathédrale du monde.
1163:
La construction est lancée par l’évêque Maurice de Sully. Selon la légende, le pape Alexandre III, en personne, aurait posé lui-même la première pierre. Ceux-ci se sont déroulés sur plus de deux siècles, se terminant à la fin du XIVe siècle sous la supervision de Raymond du Temple. À cause du long chantier et des nombreux maîtres d’œuvre s’étant succédé pour diriger les travaux, la cathédrale présente un mélange d’éléments de style roman et gothique.
1239:
Louis IX récupère la Sainte Couronne auprès de banquiers vénitiens après la mise en gage de la relique par l’empereur Baudouin de Courtenay, puis la dépose à Notre-Dame. Selon la tradition chrétienne, ce cercle de joncs réunis en faisceaux et retenus par des fils d’or, serait celui qu’a porté le Christ avant sa crucifixion. Deux ans plus tard, le roi fait construire la Sainte Chapelle pour y conserver le précieux trésor. La cathédrale Notre-Dame n’était pas encore achevée, à la fin du XIIIe siècle, les Parisiens veilleront le corps du Roi Louis IX, mort à Tunis le 25 août 1270.
1431:
Henri VI d’Angleterre est couronné roi de France par son grand-oncle, le cardinal Henri Beaufort, dans la cathédrale. À l’époque, la guerre de Cent Ans (1337 - 1453) fait encore rage et le monarque anglais, tout juste âgé de dix ans, fait figure d’imposteur aux yeux des Français. Il se dispute le titre avec Charles VII, sacré roi de France à Reims deux ans plus tôt.
1558:
Marie Stuart, reine d’Écosse et François II se marient à Notre-Dame. Plusieurs unions de monarques sont célébrées dans la cathédrale. Parmi elles, celles de Marguerite de Valois et Henri IV (1572) et de Napoléon III et Eugénie de Montijo (1853). À Notre-Dame s’est également célébré en juin 1559 le mariage, plus cocasse, d’Élisabeth de France et Philippe II d’Espagne... par procuration! Le fils aîné de Charles Quint étant absent, il fut remplacé par un émissaire, le duc d’Albe, chargé de le représenter à l’autel.
1804:
Napoléon Bonaparte est sacré empereur des Français le 2 décembre par le pape Pie VII à Notre-Dame de Paris. L’événement est immortalisé par Jacques-Louis David dans le célébrissime tableau Le Sacre de Napoléon, aujourd’hui conservé au Louvre. Les drapeaux pris à l’ennemi à Austerlitz ornent les murs et masquent le délabrement du monument, abîmé depuis la Révolution.
1831:
Victor Hugo publie le roman historique Notre-Dame de Paris, déclaration d’amour au bâtiment. La cathédrale est au centre du récit dans lequel se croisent les personnages de Pierre Gringoire, Esmeralda, Claude Frollo et Quasimodo, toujours iconiques aujourd’hui. Depuis sa publication, le chef-d’œuvre du romancier a connu de nombreuses adaptations au théâtre ainsi qu’au cinéma.
1844:
Après Jean-Baptiste-Antoine Lassus, l‘architecte Eugène Viollet-le-Duc se lance dans des travaux de restauration de la cathédrale. Le bâtisseur controversé impose, entre autres, une flèche sur la toiture du monument, alors que celle-ci a disparu de la mémoire des Parisiens.
30 janvier 1853: mariage de Napoléon III avec Eugénie de Montijo
25 août 1944:
Les cloches de la cathédrale résonnent pour la libération de Paris. Le lendemain, un Magnificat est chanté à Notre-Dame en présence du général de Gaulle et du général Leclerc.
9 mai 1945:
Le cardinal Suhard, accueille le général de Gaulle ainsi que les membres du gouvernement et les ambassadeurs des États-Unis, d’URSS et de Grande-Bretagne à la cathédrale. L’archevêque y célèbre un office au cours duquel un Te Deum d’action de grâces pour la victoire est chanté, suivi de l’exécution de la Marseillaise aux grandes orgues.
12 novembre 1970:
Une cérémonie d’hommage national est rendue à la mémoire de Charles de Gaulle. Les présidents de la République Georges Pompidou et François Mitterrand seront honorés eux aussi après leur décès en 1974 et 1995.
2012:
Mgr André Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, lance le coup d’envoi du jubilé de la majestueuse cathédrale, qui célèbre son 850e anniversaire tout au long de l’année suivante. Des travaux de restaurations sont entrepris, comme celle du Grand Orgue ou la mise en place de nouvelles cloches. Quatre ans plus tard, l’archevêché lance un appel aux dons, afin de financer les vingt prochaines années de travaux de rénovation, comme l’étanchéité de la flèche.
15 novembre 2015:
Messe d’hommage aux victimes des attentats terroristes commis à Paris le 13 novembre, après que le glas eut sonné durant un quart d’heure.
Le 6 juin 2017 :
Un policier de 22 ans est agressé à coups de marteau sur le parvis de la cathédrale par un étudiant algérien se revendiquant comme un «soldat du califat».
Le 15 avril 2019 à 18h43:
Le feu prend au niveau de la flèche en travaux. Il ravage toute la toiture de la cathédrale et menace la structure même de l’édifice. Des experts doivent se réunir mardi 16 avril pour évaluer les dommages causés sur la cathédrale par le gigantesque incendie.
Des dons sont apportés par les plus grandes fortunes pour la restauration de l'édifice, ce qui fait grincer des dents vu l'ampleur des sommes annoncées, notamment de la part de personnes pratiquant l'évasion fiscale notamment .....
E. Macron devant établir son rapport sur le grand débat l'a différé d'une semaine
Quand les travailleurs imposaient leur gouvernement.
Célébrons pour ce 18 mars, l’anniversaire de la Commune.
Ainsi, le 18 mars 1871 les travailleurs faisaient fuir la bourgeoisie parisienne et proclamaient la Commune de Paris : inspirons nous de leur exemple !
Le début de l’insurrection
En ce mois de mars 1871, Paris est encerclée par l’armée prussienne. Après six mois d’une guerre perdue contre la Prusse et d’un long siège de la capitale, la colère est grande dans la population parisienne contre ceux qui les ont envoyés au front. Au mois de septembre déjà, ils ont renversé l’Empire de Bonaparte. Et l’armistice signé en janvier 1871 par le nouveau gouvernement vient remettre de l’huile sur le feu. Les parisiens refusent de capituler.
Face à la détermination des parisiens, le 18 mars, l’ordre est donné par Adolphe Thiers de faire retirer les canons de Paris dans la nuit, notamment ceux situés à Montmartre. Au petit matin, la population surprend l’armée et se rebelle. Les chefs ordonnent de continuer l’évacuation des canons mais la grande majorité des soldats fait sécession.
Deux généraux, Lecomte, et Clément-Thomas, qui avaient participé à la répression du soulèvement de juin 1848, sont massacrés par la foule rue des Rosiers. C’est le début de l’insurrection.
La démocratie de la Commune
Alors, les communards ne seraient-ils que des patriotes jusqu’au boutistes qui refusent de faire la paix ?
Pas vraiment. D’abord, les canons que Thiers prétend reprendre au nom de l’Etat appartiennent en réalité aux communards. Durant la guerre, ce sont les travailleurs parisiens qui les ont payés eux-mêmes avec la souscription.
Mais surtout, les parisiens n’ont aucune confiance dans le gouvernement. Et ils ont bien raison. Le projet d’armistice, derrière ses apparences pacifistes, a surtout pour but de faire mater la population parisienne, coupable, aux yeux des bourgeois, d’être trop proche des idées révolutionnaires.
Après l’insurrection, le nouveau gouvernement fuit Paris et établit son siège à Versailles. Les travailleurs parisiens sont livrés à eux-mêmes et vont alors établir leur propre démocratie, radicalement différente de celle qui aura cours avant et après.
Les trois mesures phares sont la suppression de l’armée permanente, remplacée par la Garde nationale dont tous les citoyens doivent faire partie ;
l’élection et la révocabilité de tous les responsables dans l’administration, la justice, l’enseignement et la Garde nationale, ainsi que la limitation du traitement des employés de la Commune à celui d’un ouvrier.
Un fonctionnement largement plus démocratique que celui qui structure aujourd’hui la Vè République et sa caste politicienne. Il proclame aussi l’égalité totale entre les hommes et les femmes sur le plan juridique et politique, bien avant tous les gouvernements bourgeois !
Le gouvernement des travailleurs et travailleuses
Mais la Commune de Paris est bien davantage qu’un ensemble de mesures démocratiques. Elle est selon Karl Marx, qui s’est abondamment penché sur l’histoire de cette insurrection, la première forme de « gouvernement des producteurs par eux-mêmes ».
C’est bien la fuite des classes dominantes qui permet de faire exister à Paris l’un des régimes les plus démocratiques qui ait existé.
D’ailleurs, la Commune de Paris s’accompagne d’un grand nombre de mesures sociales :
la réquisition des logements vacants,
la baisse des loyers,
a création des futures Bourses du travail,
la suppression du travail de nuit chez les boulangers,
l’interdiction des amendes et des retenues sur salaire dans les ateliers et les administrations
ou encore l’éducation gratuite et obligatoire et la mise en place de coopératives ouvrières dans les fabriques abandonnées.
Dans une société où vivent des classes aux intérêts contraires, la démocratie ne peut être autre qu’une démocratie ouvrière, c’est à dire la prise du pouvoir par ceux et celles qui produisent et font tourner la société au quotidien.
Une leçon de classe que les classes dominantes en France avaient, de leur côté, bien compris.
Après s’être retiré de Paris, le nouveau gouvernement va préparer patiemment la contre-offensive. Après avoir conclu la paix avec la Prusse, le nouveau président, Adolphe Thiers va réprimer dans le sang la Commune, du 21 au 28 mai, faisant plusieurs dizaines de milliers de morts.
Une défaite de la Commune qui était envisagée dans ces termes par Karl Marx :
« Si la Commune était battue, la lutte serait seulement ajournée. Les principes de la Commune sont éternels et ne peuvent être détruits ; ils seront toujours mis à nouveau à l’ordre du jour, aussi longtemps que la classe ouvrière n’aura pas conquis sa libération. »
Sourcing: Georges Camac, in révolution permanente
Article du lundi 18 mars
18 mars 1871 :
Abandonné par les représentants de la bourgeoisie, Paris s'en remet à des militants anarchistes, des socialistes ou des blanquistes.
La Commune sera proclamée dans la foulée des élections le 28 mars 1871. La capitale doit alors faire face à un deuxième siège, non par les Prussiens mais par l'armée française. Il s'achèvera dans la tragédie, avec la Semaine Sanglante, deux mois plus tard.
Tardi a mis magnifiquement cette épopée en 3 volumes de BD, à partir du livre de Jean Vautrin.
A se procurer absolument.
Blog publication, 18 mars 2019, 16H27
Note (18/03 2019)
Soirée sur Eugène Varlin
Les "Étoiles Noires" reprennent leur envol le 23 mars 2019 !
Après Fréhel, Nikos Kavvadias, Emma Goldman et Emiliano Zapata, pour le cinquième volet, nous rendrons hommage à Eugène Varlin à l’occasion de la parution d’Eugène Varlin, ouvrier relieur 1839-1871 aux éditions Libertalia.
Eugène Varlin, ouvrier-relieur, est l’une des grandes figures de l’Association internationale des travailleurs, élu de la Commune de Paris en 1871, assassiné à la fin de la Semaine sanglante. Tous ses écrits retrouvés à ce jour (articles, proclamations, lettres), connus ou moins connus, sont présentés dans ce livre. par Michèle Audin. L’ensemble constitue comme une autobiographie de l’Internationale en France, à la fin du Second Empire, et met en lumière les ouvriers boulangers, mineurs, ciseleurs, ovalistes qui luttent pour changer la vie.
19h discussion en compagnie de Michèle Audin et Nicolas Norrito des éditions Libertalia
21h concert des poètes urbains Paul Exploit
samedi 23 mars
librairie Quilombo, 23 rue Voltaire (Paris XIe, m° Rue des boulets ou Nation).
entrée libre
événement à relayer :
https://www.facebook.com/events/579973242477447/
-- envoyé par librairie Quilombo (giacomonifred@free.fr)
Eugène Varlin
Clémence-Louise Michel 29/05/1830 - 09/01/1905
Institutrice, militante révolutionnaire et libertaire, féministe, figure majeure de la Commune de Paris.